L’aventure de trop…

La première soirée en compagnie de Rodolphe se passe à merveille, nous parlons sans nous arrêter, partageons les mêmes avis, les mêmes passions. Je lui parle de moi et il me parle de lui. Je découvre qu’en réalité au fond de lui il est triste, a des pensées sombres, et souhaite en finir. Je ne le comprends pas, lui rappelle la belle vie qu’il a, et essaie de le rassurer. Je lui prends le bras et me rapproche de lui. La soirée suit son cours et je me sens amoureuse.

La soirée s’avéra parfaite, remplie de bonheur, mais surtout d’amour. J’ai passé une nuit merveilleuse, comme beaucoup d’autres, du moins je l’espérais. Les émotions se bousculaient dans mon corps, mes sentiments étaient partagés entre l’appréhension de l’inconnu et l’excès du bonheur rendant ce moment inoubliable. La vie continue et nous avons continué à nous voir en cachette. Mais, un moment est venu tout bouleverser. J’ai senti qu’au fil de notre discussion, son humeur se dégradait, il s’éloignait de moi. Ensuite, il est parti, me laissant seule, nos silhouettes s’éloignant l’une de l’autre, dans la nuit.

Rodolphe, l’homme que j’ai aimé et pour qui j’ai tant donné, m’a extrêmement déçue. Je l’ai rencontré lorsqu’il avait besoin de mon mari pour se soigner. Il était fort bien vêtu : c’était un homme charmant et élégant. Au premier regard, on pouvait imaginer un homme attentionné, en réalité ce n’était qu’illusion. Ce malotru a brisé mon cœur. Il a osé me manipuler, moi, Emma Bovary en me faisant croire qu’il était mal au point de songer au suicide. Cela a suscité chez moi un sentiment de pitié, tout cela pour parvenir à ses fins.

Influence des gestes sur la physionomie, la colère (1859-1910) – Anonyme

Il a profité de moi ! À ses yeux, je n’étais qu’un jouet, un vulgaire objet servant à satisfaire ses plaisirs ! Qu’il aille brûler en enfer ! 

 

François-René de Chateaubriand

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 François-René de Chateaubriand (1809) – Anne-Louis Girodet

Lorsque j’étais au couvent, j’ai lu le livre Le Génie du christianisme qui est sorti en 1802 et j’ai découvert des similarités avec ma vie. Ce livre a pour objet de montrer l’excellence de la religion chrétienne sous un aspect tout nouveau : la beauté poétique. Ce qui m’a plu n’est pas la partie religieuse mais plutôt l’apparence des robes de l’époque et le romantisme. J’adhère aux idées de Chateaubriand qui démontre que la religion est plus importante face à la culture antique. La religion chrétienne est pour moi la plus poétique, mais aussi la plus favorable à la liberté, parce qu’on est libre d’écrire ce que l’on pense.
J’ai également lu le livre Atala sorti en 1801. La mère d’Atala a fait la promesse que sa fille resterait vierge, et pour ne pas succomber à la tentation, Atala s’empoisonne, ce qui m’a beaucoup touchée. Elle a fait le choix de mourir plutôt que de trahir la promesse qu’a faite sa mère envers Dieu.
Atala, ne pensant pouvoir se marier, s’ôte la vie, alors qu’il était possible pour elle d’avoir une issue heureuse, sans trahir sa mère et tout en respectant sa foi. Le livre m’a montré qu’Atala aimait sa mère. Comme j’aimerais que ma mère soit encore de ce monde pour lui montrer mon amour.

 

Ce qui devait être le plus beau jour de ma vie…

Cette journée qui devait être inoubliable n’est maintenant qu’un vague souvenir. Ce n’était pas le mariage que j’espérais. Ma famille n’avait pas les moyens d’organiser le mariage dont je rêvais. En effet, il y avait très peu d’invités, et pour la plupart ils étaient mal vêtus: ils avaient des habits et des redingotes. J’aurais voulu sortir de cette vie monotone quelques heures. Mais rien de cela ne s’est réalisé. En réalité, mon mariage se tenait à la ferme, il était très rural, il n’y avait que des personnes de la campagne. Les meubles ainsi que la décoration n’étaient pas à la hauteur de l’événement, la table n’était pas bien dressée et elle ne semblait pas stable, pas belle. Ma robe était trop longue, elle traînait sur le sol, je devais m’arrêter pour la tirer… un vrai désastre.

Enfin, je veux seulement dire que cette journée a été toute aussi ordinaire que les autres.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Wedding cake made by Willem Berkhoff for the occasion of the marriage of H.M. Queen Wilhelmina of The Netherlands and H.R.H. Prince Henry on 7 february 1901 in Amsterdam – Auteur anonyme

 

Charles

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Alfred de Richemont, Meal Time at the Bovary’s (1905)

Quand j’ai rencontré Charles pour la première fois, il venait soigner la jambe de mon père. Un soir, il est venu dîner, mon père a voulu le remercier, et c’est là que tout a commencé.  J’étais alors intimidée par sa présence, ses regards… Je me rappelle encore de la fois où sa poitrine a effleuré mon dos. A cette époque, il s’habillait déjà de manière très simple, presque campagnarde : il portait toujours de fortes bottes, un foulard qui ne lui tenait pas aux oreilles, souvent mal coiffé…

Puis, tout est allé très vite. Nous nous sommes mariés peu de temps après…quelle erreur ! Moi qui rêvais d’un magnifique mariage ! Je pensais avoir de l’amour, mais aucun bonheur n’en a jamais résulté… Mais ce n’était que le début ! Il ne pouvait se retenir de toucher à tout : mes bijoux, mon peigne, et même moi… Il devenait envahissant, beaucoup trop envahissant. Maintenant, je me rends compte que son nom va me salir comme lui.

Charles a fait des études de médecine, mais il est pourtant un bon à rien. En plus d’être nul, Charles n’a aucune ambition, rien à apprendre, rien à transmettre, je dois tout lui faire… Il provoque non seulement de la honte chez moi mais également chez ses collègues ! En plus de ça, il ne fait que manger et dormir. J’aurais aimé un mari cultivé et intéressé par diverses activités, qui excelle dans son métier, et surtout qui me comprenne…mais je n’ai qu’un homme naïf, médiocre et empoté qui me sert de mari…

 

Le bal de Vaubyessard

Hofball in Wien – Wilhelm Gause (1900)

Charles, mon mari, et moi avons été conviés à ce bal. Que de souvenirs ! J’étais si heureuse quand Charles m’a annoncé que nous y étions invités ! J’en avais toujours rêvé ! Tout était comme dans un rêve ! Le château était magnifique. Dès mon arrivée, j’ai été envahie par les odeurs qui m’étaient encore inconnues. Mais quand je repense aux discussions qu’avaient les personnes parlant italien, je me sens partagée entre deux mondes : celui de la campagne, dans lequel je suis née et j’ai grandi mais qui me fait honte, et celui de la bourgeoisie, ce monde dont j’ai toujours rêvé mais dans lequel je ne me sens pas à l’aise. J’étais incapable de choisir entre les deux mondes qui m’étaient proposés. Que faire ? En regardant par la fenêtre, je pouvais apercevoir ceux de la campagne, et en me retournant, je voyais ce monde rempli de luxe et de richesses.

Je suis tellement triste et déçue de ne pas avoir grandi dans ce monde magnifique…  Pourquoi suis-je née dans cette pauvre campagne et pas dans cette parfaite société bourgeoise ?