Ma rencontre avec un homme méprisant

En descendant de notre calèche, un homme d’une quarantaine voire une cinquantaine d’année nous a accueilli. Il était debout, posté devant son officine sur laquelle était inscrit en lettre d’or : Homais, pharmacien. Cela m’a paru vraiment très prétentieux. Il voulait vraiment mettre en avant sa richesse de pharmacien à son compte et, lorsque je l’ai vu, il m’a demandé la permission de garder son bonnet grec. J’ai donc pensé à ce moment qu’il voulait mettre en avant son bonnet qui a certainement dû coûter très cher.

Mais malgré son air hautain cela ne l’a pas empêché de nous inviter Charles et moi à dîner à ses côtés. Mes impressions se sont vite confirmées.

Durant le repas que nous avons passé ensemble, je me suis sentie mal à l’aise du fait que M. Homais n’a cessé de se vanter de sa réussite, de ses lectures de journaux qu’il commentait de la même façon que les journalistes. Il n’a cessé de parler également du travail qu’il exerce dans son officine, et particulièrement de son argent.

Quelle rencontre !

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Pharmacien préparateur de M. Filhol, atelier Vidal, 1860 – Trutat, Eugène

Léon, mon âme sœur

Chers amis, aujourd’hui, j’ai rencontré un homme se nommant Léon. Je le trouve très charmant. Comme moi, il aime la nature, son charme et sa poésie. Quand je l’ai entendu parler de la Suisse et de ses fabuleuses montagnes, j’ai eu l’impression de voyager : il m’a emmenée à travers ces paysages reposants… Au fil de la discussion, il m’a avoué qu’il aimait beaucoup la musique, et spécialement la musique allemande, car elle le fait voyager et rêver…Il est tellement poétique et rêveur. Et il ne se vante jamais : il l’a nié, mais d’après M. Homais, il joue au piano comme un vrai virtuose !

J’ai appris qu’il faisait des études de droit à Paris… Ah, Paris, cette merveilleuse ville, source de toute création artistique… Ah Paris et ses magnifiques vues sur la cathédrale Notre-Dame de Paris, magnifique bâtisse…Ah Paris, cette ville tellement romantique… Bien loin de Yonville et de ses campagnes.
Mes chers amis, ce sera tout pour aujourd’hui.  Léon est une très charmante personne, distinguée et agréable. J’espère le revoir bientôt ! Je vous écrirai si nos relations évoluent, ne vous inquiétez pas.

Emma Bovary and Léon, (1905 ) – Composition of Alfred de Richemont (1857-1911)

L’aventure de trop…

La première soirée en compagnie de Rodolphe se passe à merveille, nous parlons sans nous arrêter, partageons les mêmes avis, les mêmes passions. Je lui parle de moi et il me parle de lui. Je découvre qu’en réalité au fond de lui il est triste, a des pensées sombres, et souhaite en finir. Je ne le comprends pas, lui rappelle la belle vie qu’il a, et essaie de le rassurer. Je lui prends le bras et me rapproche de lui. La soirée suit son cours et je me sens amoureuse.

La soirée s’avéra parfaite, remplie de bonheur, mais surtout d’amour. J’ai passé une nuit merveilleuse, comme beaucoup d’autres, du moins je l’espérais. Les émotions se bousculaient dans mon corps, mes sentiments étaient partagés entre l’appréhension de l’inconnu et l’excès du bonheur rendant ce moment inoubliable. La vie continue et nous avons continué à nous voir en cachette. Mais, un moment est venu tout bouleverser. J’ai senti qu’au fil de notre discussion, son humeur se dégradait, il s’éloignait de moi. Ensuite, il est parti, me laissant seule, nos silhouettes s’éloignant l’une de l’autre, dans la nuit.

Rodolphe, l’homme que j’ai aimé et pour qui j’ai tant donné, m’a extrêmement déçue. Je l’ai rencontré lorsqu’il avait besoin de mon mari pour se soigner. Il était fort bien vêtu : c’était un homme charmant et élégant. Au premier regard, on pouvait imaginer un homme attentionné, en réalité ce n’était qu’illusion. Ce malotru a brisé mon cœur. Il a osé me manipuler, moi, Emma Bovary en me faisant croire qu’il était mal au point de songer au suicide. Cela a suscité chez moi un sentiment de pitié, tout cela pour parvenir à ses fins.

Influence des gestes sur la physionomie, la colère (1859-1910) – Anonyme

Il a profité de moi ! À ses yeux, je n’étais qu’un jouet, un vulgaire objet servant à satisfaire ses plaisirs ! Qu’il aille brûler en enfer ! 

 

Charles

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Alfred de Richemont, Meal Time at the Bovary’s (1905)

Quand j’ai rencontré Charles pour la première fois, il venait soigner la jambe de mon père. Un soir, il est venu dîner, mon père a voulu le remercier, et c’est là que tout a commencé.  J’étais alors intimidée par sa présence, ses regards… Je me rappelle encore de la fois où sa poitrine a effleuré mon dos. A cette époque, il s’habillait déjà de manière très simple, presque campagnarde : il portait toujours de fortes bottes, un foulard qui ne lui tenait pas aux oreilles, souvent mal coiffé…

Puis, tout est allé très vite. Nous nous sommes mariés peu de temps après…quelle erreur ! Moi qui rêvais d’un magnifique mariage ! Je pensais avoir de l’amour, mais aucun bonheur n’en a jamais résulté… Mais ce n’était que le début ! Il ne pouvait se retenir de toucher à tout : mes bijoux, mon peigne, et même moi… Il devenait envahissant, beaucoup trop envahissant. Maintenant, je me rends compte que son nom va me salir comme lui.

Charles a fait des études de médecine, mais il est pourtant un bon à rien. En plus d’être nul, Charles n’a aucune ambition, rien à apprendre, rien à transmettre, je dois tout lui faire… Il provoque non seulement de la honte chez moi mais également chez ses collègues ! En plus de ça, il ne fait que manger et dormir. J’aurais aimé un mari cultivé et intéressé par diverses activités, qui excelle dans son métier, et surtout qui me comprenne…mais je n’ai qu’un homme naïf, médiocre et empoté qui me sert de mari…